TRACKLISTING

  1. 'Nue comme la main'
  2. 'Les oiseaux cassent'
  3. 'Sans Mes Bras'

PRESS

Arlt

Feu La Figure

ALMST06
Release date: 04/23/2012

Les artistes ont coutume de dire que leur première œuvre s’est écrite durant le début de leur vie. Et que la suivante est née dans l’intervalle qui a suivi. Et c’est tellement vrai.

Arlt, c’est Eloïse Decazes et Sing Sing. Elle est chanteuse. Une gestuelle inséparable de ses mots, une performeuse hors du commun à la présence empreinte de mysticisme. Il est guitariste électrique et électrifié, chanteur grave et décavé. Leur première œuvre publiée en novembre 2010 avait pour nom La Langue. Un beau nom pour un album magnifique qui aurait aussi pu s’appeler la bouche, la peau, les cordes vocales et les cordes sensibles, le sang ou les os. L’âme aussi.

Le deuxième album d’Arlt s’appelle Feu la figure. Et lui aurait pu s’appeler Les Mots. Car avec cette langue qu’ils se sont inventés et qu’ils ont pétrie et modelée à leur guise, ils ont pu se concentrer encore et toujours sur les mots. Ces mots, leurs mots, ceux qui disent les maux, les animaux aussi. Ils honorent la langue française en puisant dans ses réserves insoupçonnées, en l’emballant de métaphores charnelles, d’allégories terriennes, toutes d’une poésie infinie. Leurs mots défilent, en accord parfait avec ce rock minimal et obsédé, primal et répétitif : deux voix, des guitares – celles de Sing Sing et de Mocke (du groupe Holden) – et basta.

Les artistes ont coutume d’arrondir les angles à chaque disque, surtout quand leurs débuts ont été conçus avec les moyens du bord. Du bord de mer en l’occurrence pour La Langue dont Mocke avait été le réalisateur. De l’autre bord de l’Atlantique pour Feu la figure, enregistré dans le studio Hotel2Tango de Montréal qui a déjà accouché de toute la scène post-rock locale (via notamment le label Constellation). Là-bas, le producteur Radwan Ghazi Moumneh leur a laissé le choix des armes, eux optant pour du matériel vintage. Bilan : de la proto poésie imaginée dans le bayou folk de Montmartre, enfantée dans un champ de blues neigeux de Montréal.

Deux chansons enregistrées chaque jour, cinq jours d’enregistrement, Feu la figure est né et il secoue sacrément l’arrière-train du rock’n’roll tout en donnant un coup de botte dans la fourmilière de la chanson française. Mocke s’est cette fois concentré sur sa guitare, offrant un contrepoint pourtant quasi orchestral, raffiné, au jeu blues, physique et hypnotique de Sing Sing, avec en paroxysme leur enchevêtrement idéal sur le final chamanique de « Chien mort, mi amor ». La production brute et sophistiquée de Radwan Ghazi Moumneh sert ces voix habitées, à la pureté qu’il a lui-même taillée dans un bloc de cristal pour leur permettre de répéter à l’infini ces bribes de mots hallucinées.

Feu la figure, c’est Le Pistolet à répétition qui tire des rafales d’amour vache et la promesse des plus belles déclarations de tous les temps avec « Sans mes bras » (« devant chez toi je sais qu’il faut beau tout le temps ») et « Le Périscope » (« si tu savais comme je t’aime, mon premier périscope »), avant que les fantômes de la séparation ne viennent ronger « L’Eau froide ». Et puis aussi cette invasion bestiale : un rhinocéros, un chien, une baleine, la folie incarnée dans les traits d’une sauterelle, ou le canasson de « Tu m’as encore crevé un cheval » qui piétine une passion sur une litanie de plaintes de guitares répétitives et horizontales.

Les mots du duo prennent leur source vive dans le vieux blues, les ritournelles chamaniques, la poésie des fous, l’art brut et les comptines pour enfants. Feu la Figure s’apparente ainsi à un conte sur la folie fait d’inquiétude et de joie mêlées, un voyage au bout de la nuit où les fous et les morts prennent la parole. Feu la figure est un recueil de berceuses en roc dont les visions vous hantent, un disque tellement brut et sauvage qu’il vous fera tomber amoureux de la mousse des arbres. Ici, l’amour est fou, l’eau est claire, l’animal est mal. L’œuvre d’une union sacrée. Une figure libre où rien n’ est imposé. Le fruit d’un amour fou, de l’amour feu.

 


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